Bien entendu, il ne sera pas question ici de la bouillotte classique, la simple poche remplie d'eau chaude qu'on utilise pour chauffer le fond de son lit. Nous allons parler d'une bouilloire plus sophistiquée...
En apparence, il s'agit simplement d'une poche remplie d'un liquide transparent, avec un petit élément solide (une barre, un morceau de métal) à l'intérieur. Si vous tordez le morceau, tout à coup le liquide devient opaque et se solidifie, en dégageant une grande quantité de chaleur (elle atteint en gros 55 °C). Pour regénérer la bouillotte, il suffit de la plonger suffisamment longtemps dans l'eau bouillante, et le solide blanc se liquéfie et redevient transparent. Alors, comment ça marche ?
Le liquide transparent, c'est un peu d'eau et de l'acétate de sodium : la forme basique (et non plus acide) de l'acide acétique, celui du vinaigre ! Donc c'est pas bien dangereux, et ça ne demande pas de produit toxique pour le produire. On considère donc souvent que la bouillote est particulièrement écologique.
Bref, l'acétate de sodium, en dessous de 55°C, il devrait être solide. En pratique, il ne l'est pas, du moins tant qu'on a pas déclenché sa solidification. Ca arrive avec l'eau, c'est ce qu'on appelle les pluies verglaçantes : il tombe de la pluie à une température inférieure à 0 °C. Au contact du sol, pof !, elle se transforme en glace. L'eau peut rester surfondue jusqu'à -30°C et même en dessous. Pour qu'un liquide se transforme en solide (et que ses molécules se rangent les unes à côté des autres sans plus pouvoir bouger), il faut que ça commence quelque part. Et ça ne commence pas spontanément à l'intérieur du liquide. En général, la solidification prend naissance sur une impureté, une poussière, ou une irrégularité. Dans le cas de l'acétate de sodium, l'intérieur de la bouillote est bien lisse, et il ne se passe rien.
Lorsqu'on tord le morceau placé à l'intérieur, on crée un endroit où la transformation en solide commence. Dans ce cas, en un instant, tout se solidifie. Enfin, sauf si la bouillotte arrive à atteindre 55°C puisqu'à cette température, il est normal de trouver l'acétate de sodium sous forme liquide. Celui-ci attendra donc que la bouillote refroidisse un peu pour se solidifier. C'est pour cette raison qu'on est si sûrs de la température que la bouillotte peut atteindre !
Il reste à expliquer pourquoi ça dégage de la chaleur. C'est assez simple : si les molécules d'acétate de sodium forment un solide, c'est qu'elles se collent entre elles. Si elles se collent, c'est qu'elles s'attirent, c'est à dire qu'elles ont une certaine énergie potentielle tant qu'elles ne sont pas collées entre elles. C'est comme deux aimants : lorsqu'ils sont éloignés, ils ont de l'énergie potentielle, car si on les laisse faire, la force magnétique va les rapprocher en transformant cette énergie potentielle en vitesse (ils accélèrent) puis, lorsqu'ils se collent, en chaleur. Si ! En fait, les deux aimants, une fois collés, sont un tout petit peu plus chauds. La même chose se passe, à une échelle microscopique, pour les molécules d'acétate. Ca marche aussi pour l'eau, hein. Pour transformer l'eau en glace, il faut qu'elle cède de la chaleur - bon, ça n'est pas quelque chose d'évident, mais c'est bien ça. Inversement, pour faire s'évaporer de l'eau, il faut décoller les molécules les unes des autres donc fournir de l'énergie. C'est pour cette raison que vous avez froid lorsque vous sortez de la douche : l'eau qui s'évapore est en train de vous piquer votre chaleur !
Pour regénérer la bouillotte, il suffit de la plonger dans l'eau bouillante, donc à une température supérieure à celle à laquelle l'acétate de sodium fond. Ensuite, il reste surfondu en se refroidissant, car il n'y a pas, à l'intérieur de la bouillote, de si où démarrer la solidification (ce qu'on appelle un site de nucléation).
Et voilà !